La ville où l'on vient mourir...

Photos de Jérôme Cherrier

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Aujourd'hui, on voyage et je vous emmène à Varanasi en Inde.
Alors prenez des vêtements légers, des antbiotiques contre les diarrhées et zou, décollage.
L'Inde que j'ai eu la chance de visiter quelque peu est un pays où nos répères d'occidentaux se perdent dans les senteurs d'épices et les couleurs des saris.
Pour résumer, le parisien est paumé et doit oublier qu'il est parisien (pas facile)...
L'Inde ne laisse pas indifférent et il faut du temps pour digérer son voyage, mais l'envie d'y retourner revient vite et vous tenaille...
S'il est une ville à ne pas rater durant votre trip, c'est bien celle de Varanasi, autrefois appelée Benares.
Que recèle cette ville qui mérite autant une halte ? Varanasi est une des sept villes saintes de l'Hindouhisme qui daterait de 3000 ans avant notre ère.
J'aurai du mal à vous le prouver ce que j'écris, je n'ai pas trouvé de films de cette époque dans les archives de l'Ina, mais faisons confiance à ce que nous dit Wikipedia...
Son nom vient très probablement de la contraction du nom de deux rivières qui se jettent dans le fleuve Gange : Varuna et Assi.
Ah oui, je ne vous l'ai pas dit, mais le Gange traverse cette ville. Et c'est une des raisons pour lesquelles elle est si importante pour les Indiens, ou plutôt les Hindouistes.

En effet se baigner dans le fleuve permet de se purifier. Je parle des péchers et non du corps, car le Gange est plutôt un rassemblement de microbes et autres bactéries.
Y mourir et s'y faire incinérer permet de se libérer du cycle des réincarnations.

Le décor posé attachons nous à ce qui en fait une ville si particulière.
Le long des rives du Gange sont disposés des ghats. Ce sont des accès directs aux Gange. Les croyants les empruntent pour descendre y faire leurs ablutions, entre autres choses comme nous le verrons plus loin.

Deux ghats sont réservés à la crémation des corps.
C'est assez... particulier... Un des deux ghats fonctionne uniquement le jour et le second 24h sur 24. Il faut environ 3h pour brûler un corps et 300 kilos de bois.
J'imagine que cela posera des problèmes dans quelques temps. En effet, mourir à Varanasi est une vraie volonté des Hindous. Avec l'enrichissement (certes encore relatif) du pays, et les facilités de transports qui se mettent en place (lignes aériennses qui se développent), de plus en plus de personnes vont venir mourir à Varanasi.
Comment l'Inde gèrera cet afflux de personnes ? Je ne le sais pas...

Notre approche de la mort en occident est différente de celle de l'Inde. C'est pourquoi cette tradition de crémation peut nous sembler choquante. Imaginez vous promener le long de la Seine ou du Rhône et apercevoir un corps brûler. Et bien c'est ce qui se passe en Inde. Les Ghat sont accessibles à tous, la seule contrainte est de ne pas filmer ni prendre de photos.
Je vous avoue que lorsque vous y passez la première fois, vous hésitez à jeter un oeil, mais finalement on s'y habitue, comme pour tout. Croiser un cortège dans les ruelles qui descend un corps au Gange est en revanche beaucoup plus troublant.

Au delà de ça, la ville dégage un atmosphère de quiétude étonnante. Le temps semble s'être arrêté il y a des siècles. Sur les rives peu de signes de modernité viennent encombrer la vue, si ce n'est les fils électriques. Les rives débordent de bâtiments aux architectures étonnantes. Certains sont écroulés et s'enfoncent en partie dans le fleuve. Les façades sont finement ciselées, fenêtres grillagées afin d'empêcher l'intrusion des singes dont les indiens se méfient. Mais souvent un réel besoin de ravalement se fait sentir. Je ne pense pas que ce soit la priorité.

Le lieu, même s'il est en étroit rapport avec la mort regorge de vie.

Le Gange sert à tout. On y brûle les corps dont on jette les cendres, les animaux s'y baignent à côté des humains venus faire leurs ablutions, les femmes s'y trempent complètement habillées. On y fait également ses lessives. Les saris aux couleurs chatoyantes sèchent sur les rives après avoir été lavés dans le fleuve. Pour avoir fait laver mes vêtements là bas, j'aurai du mal à vous dire si ceux-ci sont revenus propres, mais ils sont revenus troués. Les fibres n'ayant pas résisté à l'essorage sur les pierres... Donc, pas plus propres, abimés, mais purifiés... Il faut trouver du positif !

Les barbiers sont également présents, les yogis délivrent des cours aux élèves, les joueurs de cricket s'envoient la balle. Et bien sûr on vient également visiter la ville, en barque ou à pied. Les Indiens visitent beaucoup leurs patrimoine. D'ailleurs, les prix d'entrée (quand il y en a) sont attractifs et beaucoup, beaucoup, beaucoup moins chers que ceux pratiqués pour les touristes.

Les ghats s'étendent sur plusieurs kilomètres et la balade est agréable malgré la chaleur. Le soir, au ghat principal (Dashashwamedh Ghat) se rassemblent les fidèles pour prier ensemble. Des hauts parleurs diffusent de la musique envoutante, des bougies sont allumées et posées sur le fleuve. On se sent vraiment ailleurs et se laisser bercer par le rythme de la musique vous transporte dans un état second. Tout serait impeccable si les moustiques ne se mêlaient pas à la fête...

Mais Varanasi ne se limite pas au Gange. Pour bien découvrir une ville, il faut vous y perdre. Ca tombe bien, je ne crois pas qu'il en existe un plan.

C'est dans les ruelles que vous y découvrirez la vie au quotidien. Les échoppes d'alimentation, les coiffeurs, les vendeurs de saris, d'épices... Chaque croisement est synonyme de découverte. Les photographes se régalent, on se soucie moins du droit à l'image que dans nos contrées... Laissez vous allez dans les différents quartiers, laissez vous porter par le flot et observez cette vie si différente de la notre...

Si vous passez en Inde un jour, prévoyez une étape dans cette ville. Vous en prendrez plein les yeux, plein le nez, bonnes et mauvaises odeurs se cottoyant. Vous en prendrez plein le bide, la nourriture est très bonne mais il faut être prudent et ne pas oublier sa trousse à pharmacie.

L'Inde ne peut vous laisser indifférent et Varanasi vous marquera à jamais...

Et peut être y retournerez vous un jour...

Mais ça, c'est une autre histoire...

Jérôme